En cas de dysfonction de capteur
Notion de dysperception
En principe, même si un capteur est en dysfonction, les centres nerveux supérieurs sont dans la capacité de se passer de l’information du capteur défaillant. Mais il peut arriver que les centres nerveux supérieurs n’arrivent plus à faire la part des choses, on parle alors de dysperception.
Dans le cas de dysperception, la précision des actes sensoriels ne pourra plus être assurée. Or la régulation posturale, la modélisation de la verticale, la stabilité du regard et les tâches cognitives (lecture, écriture…) sont avant tout des actes sensoriels.
Les conséquences d’une dysperception
D’un point de vue postural
Le centre supérieur aura de multiples informations qui seront incohérentes. La réponse posturale qui en découlera ne sera pas adaptée au réel besoin d’équilibre. Il y aura des tensions articulaires et musculaires qui créeront une mauvaise posture (augmentation ou diminution des courbures physiologiques de la colonne vertébrale, attitude scoliotique, rotation des ceintures scapulaire et pelvienne).
Ces tensions maintenues sur le long terme vont engendrer des pathologies musculo-ostéo-articulaires (scoliose, arthrose prématurée, jambe courte, hernie-discal, maux de tête, entorse à répétition, tendinite à répétition…).
D’un point de vue cognitif
Concentration
Quand il n’y a pas dysperception, le cerveau va utiliser le moins d’information possible (principe de l’économie d’énergie) pour assurer les besoins primordiaux de l’organisme (tenir l’équilibre). Il a donc une capacité de concentration sur une tâche cognitive.
S’il y a dysperception, le cerveau va utiliser toutes les informations possibles même si celles-ci proviennent d’un capteur en dysfonction. Le cerveau sera donc en permanence en train de rétablir l’équilibre du corps. Il va donc perdre en capacité de concentration.
Exemple concret : Imaginez un élève en classe, assis sur une chaise et à qui on demande de se concentrer sur ce qui est écrit au tableau, il faut avant tout que les centres supérieurs assurent les besoins primaires de l’organisme qui est de rester en équilibre, de ne pas tomber. Quand tout va bien, le cerveau va sélectionner quelques capteurs pour garder cet équilibre (il ne faut pas oublier que nous avons une stratégie d’économie d’énergie, c’est à dire que même si tous les capteurs vont bien, les centres supérieurs utiliseront le moins de capteurs possible). Cette non-utilisation de certains capteurs laisse au cerveau une capacité de concentration sur une tâche plus cognitive. Donc l’enfant pourra se concentrer sur le tableau. S’il a un problème de dysperception, son cerveau ne saura plus quel capteur « écouter ». Donc, il perd en capacité de concentration et il a même une difficulté à rester assis tout simplement. Il a deux solutions : soit il va se « fixer » : enrouler ses jambes au barreau de chaise ou encore se tenir au bureau, s’asseoir sur une jambe… Ou alors il se met à bouger, car dans le mouvement il ne va pas tomber (on augmente l’activité du capteur proprioceptif pour avoir une source supplémentaire d’information), l’enfant sera alors étiqueté hyperactif.
Lecture, écriture, représentation visuo-spatiale
Si les notions de verticale et la stabilité du regard sont perturbées, alors l’acte sensoriel de la vision sera perturbé et va demander au cerveau des tâches supplémentaires qui ralentissent tout le processus de la lecture, et de l’écriture.
De plus, l’enfant sera instable à cause de son problème postural, il sera donc en recherche permanente d’équilibre, et apprendre à lire lorsqu’on est instable n’est pas facile. Pour imager la situation, imaginez lire un livre tout en marchant sur une poutre. L’organisme va plus se concentrer sur son équilibre que sur la lecture.
Rééducation posturologique
Notion de reprogrammation posturale
Le but de la rééducation va être de corriger les capteurs en dysfonction. Le bilan et les différents tests vont nous permettre de hiérarchiser la priorité des traitements.
L’organisme étant resté souvent des années dans un certain schéma postural, va peu à peu prendre cette posture comme nouveau critère de normalité. Il ne pourra plus avoir de correction automatique puisque la référence est mauvaise.
Il faudra donc un certain temps pour que la rééducation fasse effet. Le temps de reprogrammer le système postural. C’est la rééducation des différents capteurs sur le long terme qui va donner les bonnes efférences sensorielles et ainsi corriger le critère de normalité, ce qui permettra d’améliorer la posture et ainsi les différentes pathologies associées.
Chaque capteur sera rééduqué par un spécialiste (orthoptiste, occlusodontiste, orthodontiste, ophtalmologiste, orthopédiste, ostéopathe, kinésithérapeute…).
On vient de voir l’influence de la posturologie sur des troubles physiologiques comme les douleurs chroniques, la scoliose… mais aussi sur des troubles de l’apprentissage, face auxquels se trouvent de plus en plus d’enfants.
Pour reprogrammer ce système postural, qui est donc un système biomécanique et neurologique, il faudra rééduquer les capteurs en dysfonction.
Dans le cadre d’une rééducation d’une pathologie cognitive, nous ne corrigeons que les outils (les capteurs) de cette tâche. L’utilisation pratique de ces outils (apprendre à lire, bien écrire) est assurée par d’autres professionnels comme les orthophonistes.